J'ai testé pour vous : "les qbits et la spintronique au Japon!"
Aujourd’hui nous vous présentons le témoignage de Claire Fougerouse, qui vient de rentrer du Japon. Elle a étudié là-bas la spintronique “une technique qui exploite la propriété quantique du spin des électrons dans le but de stocker des informations”.* En janvier dernier, quand elle était encore à Sendai, au Japon donc, nous lui avions posé quelques questions sur son expérience. |
Agnès : Peux-tu te présenter? Ton parcours, qu’est-ce que tu fais aujourd’hui ?
Claire : 22 ans, et bientôt 23, je suis élève à l’École de Mines de Saint-Étienne. Après 3 ans de prépa au lycée du Parc à Lyon - oui 3, on ne réussit pas tout du premier coup, j’ai donc fait la fameuse « 5/2 » - je suis maintenant en deuxième année d’école d’ingénieur. Curieuse, touche à tout et aimant voyager, j’ai sauté sur l’occasion que représente le « Semestre 7 » pour partir un semestre au Japon. Je m’intéresse actuellement au matériau, et me suis donc tournée vers Tohoku University à Sendai où, en plus des cours auxquels j’assiste, je suis rattachée à un labo de spintronique. On m‘a alors proposé de participer à un sujet de recherche où je m’occupe de la partie simulation numérique. En dehors des cours, avant, j’étais orienté sport et surtout tir à l’arc. Mais la prépa n’ayant pas ménagé les aspects sociaux de la vie, je me suis arrêtée. Mon temps libre est donc maintenant principalement consacré aux projets perso, à mes amis et à mon copain.
Agnès : Qu’est-ce que t’apporte le fait de savoir coder aujourd’hui? Tu aimes cela? Quels sont tes langages fétiches?
Claire : Ah le code ! Dans le labo où je suis c’est ce qui a fait la différence. En fait à la base je suis au mieux amatrice dans le domaine informatique. Et, partant sur une majeure « matériaux », je n’ai pas pris de cours de code au Japon. Mais, que ce soit en prépa ou à l’Ecole des Mines, on apprend à apprendre - pas de la même manière pour les deux évidemment, mais le principe y est. Ainsi quand je suis arrivée au Japon, et que je devais, pour commencer ma mission, passer un programme de simulation de phénomènes de spintronique depuis un langage vers un autre, tout en l‘optimisant, j’ai eu la réaction la plus naturelle pour une telle situation : l’envie de fuir très loin! Après une courte bibliographie pour acquérir un socle de connaissance sur les interactions spin-orbite, je me suis penchée, non sans appréhension au début, sur le code fourni. Quelle surprise de découvrir que je le comprenais et voyais déjà les étapes à changer ! Une semaine m’a alors suffit pour réaliser la « traduction ». J’ai constaté en fait la différence de formation : si les personnes de mon labo sont capables de discuter des heures sur les manières d’inverser un spin en fonction du matériau choisi, sortis de ce domaine ils sont assez « démunis ». Finalement, coder c’est quelque chose qui me plait, mais ça reste pour moi un outil où je n’ai pas beaucoup de maitrise (même si c’est bien plus que mes lab’mates)
Agnès : Là tu es donc au Japon… et tu travailles dans un labo spintronique? Kesako?
Claire : Le spintronique s’intéresse au stockage/transmission d’informations, mais pas uniquement grâce à la charge de l’électron : cette fois on veut utiliser le spin. C’est littéralement l’électronique du spin ! Du coup plus le choix, il faut passer par la physique quantique. Etape nécessaire vers le « super ordinateur », on entend déjà parler de qbit (l’analogue quantique du bit), d’intelligence artificielle basée sur le spintronique, etc. On miniaturise tout et on augmente les capacités de stockage. Un peu le rêve non ? C’est aussi une réponse permettant de prolonger l’avancement des systèmes magnétiques (MRAM, capteurs, …). Enfin, si on continue de se pencher sur le sujet en tout cas ;)
Agnès : Tu es la seule fille là-bas apparemment ? Est-ce que c’est dur? Comment vis-tu cela?
Claire : Oui, enfin disons qu’en théorie, non, je n’étais pas la seule : une deuxième fille en échange est arrivée quelques temps après moi et est repartie en décembre. Cependant on ne l’a vu que trois fois au labo et elle ne s’est jamais jointe aux différents repas/sorties réalisés en équipe. Donc dans la pratique je suis bel et bien la seule fille. Je suis bien obligée d’avouer qu’au début ça m’a fait un petit choc. Je savais que l’ingénierie des matériaux n’était pas un domaine très féminin, mais de là à être seule c’est une sacré marche. Visiblement ce fait était réciproque puisque lors de la « welcome party », le professeur du labo m’a introduite comme « female exchanges student ». Mais outre cela, tout est normal.
Agnès : Tu veux faire quoi après tes études??? Un métier dans la technique ou pas? Le fait que ce soit un domaine très masculin t’encourage ou ne t’invite pas à y aller?
Claire : J’avoue que pour moi « après » ça a toujours posé problème. Si vous voulez mon avis il y a beaucoup trop de choses intéressantes pour en choisir une seule. Donc après les études c’est encore flou. Mais que mon futur métier soit technique ou dans un domaine masculin ne m’effraie pas. Au pire cela constituera un défi !
* https://fr.wikipedia.org/wiki/Spintronique
Merci Claire !